Le réalisme. Examen annuel de l’Agenda 2030. ONU-New York

Miguel Ángel Velasco cmf

De l’équipe clarétaine à l’ONU

Master de l’UNITAR en études du développement et diplomatie

Le contexte du Forum politique de haut niveau (FPHN) sur le développement durable

Mardi dernier, le 5 juillet, le Forum politique de haut niveau (FPHN) sur le développement durable a débuté au siège de l’ONU à New York. Ce Forum examine chaque année la conformité avec l’Agenda 2030, réorientant et ajustant sa mise en œuvre. La réunion a débuté le 5 juillet et se termine le 18 juillet ; la première semaine est consacrée à l’examen de l’Agenda 2030, sur un thème donné et sur cinq ODD spécifiques ; la deuxième semaine présente les rapports volontaires de chaque pays sur son programme de mise en œuvre de l’Agenda 2030. Participent au Forum : les représentants de 54 États des Nations unies, en tant que membres à part entière ; les porte-parole des principaux groupes de la société civile, qui ont le droit d’exprimer leur opinion ; et les représentants des ONG reconnues par l’ECOSOC (Conseil économique et social des Nations unies), qui peuvent assister au Forum sans avoir voix au chapitre. Dans cet article, je me concentrerai sur mes impressions de la première semaine, c’est-à-dire l’examen de l’Agenda 2030, en particulier de cinq des ODD.

Pour plus d’informations, veuillez consulter

https://www.globalcmf.com/sdg2030-agenda/hlpf-2022-on-sustainable-development

Le titre du Forum de cette année était : « Reconstruire ce qui a été détruit par COVID-19 et avancer vers la pleine mise en œuvre de l’Agenda 2030 pour le développement durable ». Les ODD sur lesquels l’examen s’est le plus concentré sont les suivants : SDG4 sur l’éducation de qualité, SDG5 sur l’égalité des sexes, SDG14 sur la vie sous l’eau, SDG15 sur la vie sur terre et SDG17 sur les partenariats pour les Objectifs.

Un tournant dans l’histoire du monde

Depuis l’adoption en 2015 de l’Agenda 2030, qui comprend les Objectifs de développement durable, le monde ne s’est pas arrêté. Nous aurions beau prétendre que le monde de l’Agenda reste inchangé, il n’en est rien. Pendant la période précédant la pandémie de COVID-19, il semblait que tout allait raisonnablement bien. Les ODD les plus proches des objectifs du millénaire pour le développement (OMD) s’améliorent, comme le montrent les indicateurs de conformité. L’Agenda 2030 commençait à être accepté comme une véritable référence en matière de développement dans la plupart des pays. Tout se passait bien. La pandémie de COVID-19 a représenté un choc mondial auquel l’ONU n’a pas échappé. Les réunions du HLPF sur le développement durable de 2020 à 2021 ont présenté des données inquiétantes sur ce qui se passe, mais rien de plus. Les conséquences de COVID-19 n’étaient pas connues, pas plus que la manière d’agir ; l’ONU, comme tout le monde, était en état de choc. Au HLPF 2022, la situation s’est présentée telle qu’elle est : extrêmement alarmante.

Les rapports préliminaires du secrétaire général des Nations unies, le rapport sur la réalisation des objectifs de développement durable 2022 et les présentations faites lors du forum HLPF-2022 ne laissent aucune place au doute. Tous les indicateurs de conformité aux ODD ont diminué de manière très significative par rapport à la tendance antérieure à COVID-19. Nous pouvons dresser une liste courte mais impressionnante des problèmes mondiaux qui ressortent de la lecture du rapport 2022 et des présentations du HLPF-2022. En voici une courte liste : augmentation très importante du taux de pauvreté ; augmentation de la précarité de l’emploi et du nombre d’emplois ; dette impayable par les pays les plus pauvres ; augmentation du nombre de réfugiés et de personnes déplacées, le plus élevé depuis la Seconde Guerre mondiale ; millions d’enfants non scolarisés ; augmentation de la violence à l’égard des femmes ; diminution de la parité entre les sexes ; augmentation des émissions de CO2 dans l’atmosphère. Je vous invite à lire au moins le résumé du rapport 2022 pour connaître la situation plus en détail.

Dans le cadre du HLPF 2022, les crises actuelles ont été présentées : crise économique de 208, pas encore totalement digérée ; pandémie COVID-19 ; conséquences de plus en plus évidentes du changement climatique ; invasion de l’Ukraine par Poutine et ses conséquences sur les réfugiés, la famine, les pénuries d’énergie, des milliers de morts. Non, le tableau actuel et futur dressé lors du Forum 2022 n’est pas réjouissant. Le changement des relations internationales provoqué par l’invasion de l’Ukraine n’a pas été abordé lors de ce Forum de haut niveau, mais il est clair que l’organisation internationale du monde change et changera encore plus. Le monde et ses relations sont en pleine mutation. Il n’y a aucun doute : la nouvelle configuration des relations internationales aura un impact direct sur la réalisation ou non de l’Agenda 2030.

Les propositions du Forum

Que peut-on faire pour remédier à cette situation et que proposent les panélistes de premier plan au FPHN ? Une fois encore, dressons une liste de propositions prioritaires.

1. la réaffirmation de l’Agenda 2030 comme référence mondiale face aux crises que nous vivons et continuerons de vivre. Il est difficile de trouver parmi les documents émanant des Nations unies un document ayant autant d’impact et de survie que l’Agenda 2030 ; peut-être seule la Déclaration universelle des droits de l’homme surpasse-t-elle l’Agenda à cet égard. Ce n’est pas surprenant : le contenu et la complexité de l’Agenda 2030 sont le résultat d’un nouveau processus d’étude et de négociation des documents des Nations unies. L’étude du contenu de l’Agenda a été ouverte, pour la première fois dans l’histoire de l’ONU, aux universités, aux experts externes, aux ONG, aux organisations confessionnelles ; en d’autres termes, à la société civile. Le résultat est un Agenda 2030 qui va au-delà de sa limite de temps et présente une voie concrète vers un avenir solidaire pour l’humanité.

2. Le changement climatique. La crise climatique traverse une grande partie de ce qui s’est passé au cours des dernières décennies et préfigure ce qui est à venir. Déplacements massifs, inondations, sécheresses, acidification des mers, etc. Une volonté politique est nécessaire pour surmonter l’indécision et l’inefficacité des accords de Madrid COP-25 et de Glasgow COP-26 sur le changement climatique.
4. Paix et réconciliation. L’ODD 16 se réfère fondamentalement à la situation de chaque pays, mais, dans la situation actuelle, il est nécessaire de se référer au panorama international. La reconfiguration des blocs internationaux ne peut signifier un retour à la guerre froide. Les dépenses d’armement des grandes puissances ne doivent pas compromettre leur contribution aux pays les moins avancés.

4. Financement de l’Agenda 2030. Beaucoup de choses ont été écrites et convenues depuis qu’Addis-Abeba (2015) s’est mis d’accord sur le financement du développement durable de l’Agenda ; mais il reste encore beaucoup à faire après les crises que nous connaissons. Le HLPF parle de financement public à travers, surtout, le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement et les banques régionales. Parallèlement aux mécanismes de ces entités et compte tenu de l’ampleur du défi, un effort supplémentaire est demandé à la société civile par le biais de la participation de grandes entreprises mondiales, de donateurs individuels et d’investissements dans des « obligations vertes » et des « obligations de l’Agenda 2030 ».

5. L’éducation. Il est vrai qu’il s’agit de l’un des ODD en cours de révision pour l’année 2022, mais tous les participants au HLPF ont insisté sur la nécessité de retrouver la voie de l’augmentation de la scolarisation, avant le COVID-19. Les ressources pour le développement personnel et national reposent en grande partie sur l’éducation formelle. Les millions d’enfants qui ont abandonné l’école doivent y retourner.

6. Le multilatéralisme. Les questions de stratégie mondiale et de relations entre blocs n’ont pas été abordées lors du HLPF 2022, mais le bruit de fond n’a pas cessé de résonner. Le monde, ses habitants, ne pourront pas supporter les conséquences d’une nouvelle guerre froide. Il faut trouver des voies pour le multilatéralisme.

L’année 2023 sera une année spéciale pour le Forum politique de haut niveau sur le développement durable. Ceux qui préparent le HLPF ont demandé à plusieurs reprises que ses conclusions soient claires, distinctes et efficaces. Un forum unique avec une déclaration finale qui engage réellement les gouvernements et la société civile ; des conclusions qui sont contraignantes et pas seulement des mots politiquement corrects.

Le bon berger. Sauvé du bombardement atomique d’Hiroshima

Les organisations confessionnelles (OC) devront être très attentives à ce qui se passe en 2023, une année qui devient une année clé pour l’avenir de l’humanité. En tant que croyants, nous devons retrouver, dans ces moments critiques, la confiance dans le Dieu de l’Histoire, qui conduit toutes choses à une bonne fin.

Miguel Ángel Velasco cmf