Partie II : Ressources pour la réconciliation
J.M. Joseph Jeyaseelan, CMF
Sri Lanka
1) La première ressource de l’Eglise est son message de réconciliation lui-même, et la spiritualité qui en découle. Parmi les nombreuses choses que nous avons mentionnées dans les sections ci-dessus, l’une des choses importantes que le message chrétien de réconciliation offre est l’espoir, une histoire pleine d’espoir à laquelle se connecter et dans laquelle se placer. Une pédagogie de la Croix du Christ, des images, des récits et des histoires tirées de l’Écriture fournissent des indications importantes sur ce qui compte dans la réconciliation.
2) La deuxième ressource est le répertoire des rituels et des sacrements de l’Église. L’Eucharistie est un symbole puissant et un espace rituel de la présence et de l’absence du Seigneur, et de la manière dont cela guérit la mémoire et apporte une nouvelle espérance. En outre, l’Église peut utiliser son espace sacré pour des moments rituels importants qui dépassent la vie de l’Église et scellent les excuses, entendent les déclarations de pardon et célèbrent les mouvements vers de nouveaux lieux. Dans sa prédication, elle peut fournir une éducation permanente à la spiritualité de la réconciliation. Les rites funéraires donnent également l’occasion de pleurer la perte des victimes de l’oppression et de leur offrir des enterrements décents. L’Église catholique romaine exprime également le ministère de la réconciliation dans le sacrement de la réconciliation.
3) La capacité à créer des communautés de réconciliation est une autre ressource importante que possède l’Église. L’Église dispose de ressources en termes de personnel formé, d’infrastructures et même de finances pour créer des espaces de sécurité, d’hospitalité, de mémoire et d’espoir qui aident à créer des communautés de réconciliation. Lorsque ces ressources sont tournées vers l’intérieur (sur et vers les membres de l’Église), elle peut aider à créer un cadre de personnes réconciliées qui peuvent servir de levain dans la société en fournissant la vision et la mission alternatives dont nous avons tant besoin dans notre monde brisé. De plus, comme l’Église est une organisation internationale, elle a la possibilité, par l’intermédiaire de ses agences d’aide et de développement, de ses ordres religieux internationaux et de sa solidarité compatissante, d’œuvrer à la réconciliation.
4) L’Église catholique romaine dispose également d’un riche dépositaire de l’enseignement social catholique (CST) qui peut fournir des informations essentielles sur des thèmes liés à la réconciliation. Bien que la CST soit connue comme le secret le mieux gardé de l’Église catholique, ce n’est un secret pour personne que des personnes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Église catholique, se sont tournées vers la CST pour obtenir des conseils, de la sagesse et de l’inspiration en matière de prévention et de résolution des conflits et de consolidation de la paix.
5) La magistère de l’Église : Bien que peu d’entre eux soient liés à la réconciliation, le magistère universel de l’Église et les magisteries locales (régionales, nationales et diocésaines) peuvent offrir des directives importantes pour le travail de réconciliation. Africae Munus est l’un de ces documents importants de l’Église universelle.
Les conférences épiscopales régionales et nationales de certaines régions du monde ont, soit par des documents, soit par des directives pratiques, soit par exemple, donné des outils pédagogiques que les églises d’autres régions peuvent adapter ou dont elles peuvent s’inspirer (par exemple, l’engagement de la conférence épiscopale du Chili dans les années 1980).
6) Les histoires personnelles des gens sont peut-être une ressource inaperçue ou considérée comme allant de soi, dont l’Église dispose et qu’elle n’utilise guère. Je voudrais l’appeler « les histoires du seuil de l’Église et les voix des marginaux ». D’une part, les membres de l’Église ont été accusés d’être directement ou indirectement complices de certains conflits (au lieu d’être des ministres de la réconciliation). D’autre part, il y a eu de nombreux petits succès inconnus, ou mieux encore, de fidèles histoires de réconciliation initiées et soutenues par un petit groupe d’individus ou de groupes liés à l’Église. Il y a aussi de nombreux membres de l’Église qui ont parlé ou écrit, interprétant souvent l’Évangile d’une manière différente, et dont on peut tirer des « idées explosives » pour le travail de réconciliation. Il est tragique de constater que, dans la mesure où ils ne sont pas membres du clergé ou de la hiérarchie de l’Église, ces voix et ces récits ne sont parfois ou souvent pas pris au sérieux et considérés comme des ressources (au sein de l’Église) pour le travail de réconciliation de l’Église. Même si certains sont des prêtres, des religieuses et des évêques, ils peuvent vivre en marge de l’Église institutionnelle ; ou ils ne sont pas « aimés » par le centre car ils peuvent être engagés dans le travail qu’ils font en allant bien au-delà des limites traditionnelles du « territoire de mission » de l’Église. Ils peuvent travailler dans un contexte œcuménique ou interreligieux, ce que le centre peut avoir du mal à accepter. Mais j’aimerais proposer qu’il s’agit d’une ressource importante que l’Église doit remarquer et dont elle doit tirer profit. (A suivre)
J.M. Joseph Jeyaseelan, CMF
Sri Lanka
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